
Les Algériens n’iront plus se soigner en France «Nous perdons du temps avec Macron» a dit Tebboune
Alors que les relations sont tendues entre l’Algérie et la France en raison de ...
© Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a considéré qu'hormis les relations commerciales, les échanges étaient rompus entre la France et l'Algérie. [LUDOVIC MARIN / AFP]
Alors que les relations sont tendues entre l’Algérie et la France en raison de l’emprisonnement du l’écrivain Boualem Sansal et de l’arrestation de plusieurs influenceurs algériens et franco-algériens pour apologie de la violence, le président de l’Algérie Abdelmadjid Tebboune a brutalement tancé Emmanuel Macron.
«Le dialogue politique est quasiment interrompu». Dans un entretien accordé à nos confrères de L’Opinion, le président algérien Abdelmadjid Tebboune a dénoncé le «climat délétère» entre l'Algérie et la France et juge que les deux pays doivent reprendre le dialogue, une fois qu'Emmanuel Macron en aura clairement exprimé le souhait.
«Nous perdons du temps avec le président Macron», a-t-il ajouté, reconnaissant que «plus rien n’avançait si ce n’est les relations commerciales».
Une profonde crise
Les deux pays sont plongés dans une profonde crise diplomatique depuis l'annonce fin juillet par Paris d'un soutien au plan d'autonomie marocain au Sahara occidental, territoire au statut non défini à l'ONU et théâtre d'un conflit depuis un demi-siècle entre le Maroc et les indépendantistes sahraouis du Front Polisario, soutenus par Alger. Les contentieux entre les deux pays ne cessent depuis de ressortir.
Les patients algériens iront se soigner ailleurs.
En Belgique, en Italie ou encore en Turquie, par exemple. Mais plus en France, annonce Abdelmadjid Tebboune sur fond de polémique autour des frais de soins impayés, énième épisode d’une crise diplomatique majeure entre Alger et Paris qui dure depuis juillet 2024.
En Algérie, le président Abdelmadjid Tebboune a annoncé que les patients algériens cesseraient d’être envoyés en France pour se faire soigner. «Nous avons pris la résolution de ne plus envoyer nos malades en France. Ils vont dans d’autres pays européens, comme l’Italie, la Belgique ou encore la Turquie. C’est le résultat de toutes ces tracasseries que nous subissons», a-t-il déclaré dans une interview accordée le 2 févier au quotidien français l’Opinion, sur fond de polémique autour des frais de soins impayés, qui agite dernièrement la presse française.
Selon plusieurs médias français, des Algériens quitteraient les établissements de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (APHP) sans payer leurs soins. «45 millions d'euros, telle est la dette algérienne auprès des hôpitaux parisiens en 2023», relayaient il y a quelques jours des médias français, certains organes de presse allant même jusqu’à évoquer un «scandale médical», alors que des médias algériens contestent ces chiffres et dénoncent une campagne de désinformation.
Le président Tebboune a de son côté réfuté les chiffres avancés dernièrement par les médias français concernant le montant de la dette algérienne auprès des hôpitaux en France. Pour le chef de l’État, le montant des arriérés est estimé seulement à 2,5 millions. Un chiffre identique à celui avancé par le gouvernement français cette semaine.
«Sur les 150 millions d’euros entre 2007 et 2023 qui concernent les financements algériens, le recouvrement est assez satisfaisant puisque jusqu’à l’heure où je vous parle, il reste 2,58 millions d’euros à recouvrir. Cela concerne le système public sur lequel on a une grande lisibilité», a détaillé Yannick Neuder, ministre français de la Santé lors d’une audition au Parlement.
Objet de contentieux
Selon le président algérien, ce chiffre fait par ailleurs l’objet d’un contentieux. «Cela fait trois ans que l’on attend une réunion avec les hôpitaux de Paris pour lever ce contentieux (…) L’Algérie a toujours payé ses dettes, mais nous ne sommes pas prêts à honorer n’importe quelle facture. Il faut que l’accueil et la prise en charge soient justifiés», a-t-il expliqué.
La crise diplomatique entre Paris et Alger remonte à fin juillet 2024 quand Emmanuel Macron a reconnu la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. Les dirigeants des deux pays multiplient depuis les joutes verbales et les accusations réciproques dans un contexte de plus en plus tendu, qualifié par Abdelmadjid Tebboune de «délétère».
Cette crise, caractérisée par des poussées de fièvres récurrentes, a été marquée récemment par l’affaire Boualem Sansal et l’expulsion ratée d’un influenceur algérien par la France, mais aussi par la volonté affichée par Paris de remettre en cause un accord sur l’immigration algérienne datant de 1968, et la réactivation par Alger du dossier contentieux des essais nucléaires de la France coloniale dans le désert algérien.
Interrogé sur le cas de l'écrivain Boualem Sansal, critique du pouvoir algérien incarcéré depuis mi-novembre, Abdelmadjid Tebboune a jugé que ce «n'est pas un problème algérien. C'est un problème pour ceux qui l'ont créé, d'autres cas de binationaux n'ont pas soulevé autant de solidarité». L'écrivain, qui a obtenu la nationalité française, n'a pas pu bénéficier de visite consulaire, le président algérien juge qu'il est «d'abord Algérien». Face à cette escalade des tensions, 81% des Français sont favorables à des sanctions économiques contre l’Algérie.
Africa24monde avec Regard Sur l'Afrique