Il est tout à fait possible que Moscou ne soit pas seulement en train de perdre la Syrie, mais contribue en fait à la prise de la Syrie. Ce qui augmenterait de façon considérable l’ampleur de la trahison.
Tout laisse à penser qu’il s’agit d’un transfert planifié et contrôlé de l’Etat syrien. Au cours de ces dix jours, je n’ai pas vu une seule bataille. Je ne sais pas par qui, mais c’était orchestré à 100 %.
Je me demande ce qu’il adviendra désormais de l’Armée Arabe Syrienne. Sera-t-elle – comme les Irakiens – réformée par les Israéliens, les Etats du Golfe et les Américains pour devenir un nouveau groupe terroriste muzzrat de type ISIS qui sera ensuite utilisé contre l’Iran ? Nous verrons bien.
Assad, l’actif de l’Occident
Le problème, concernant la popularité, n’était pas nécessairement qu’Assad est/était alaouite et que la majorité du pays ne l’est pas. Le problème est qu’Assad était vraiment détesté par la plupart des Syriens pour avoir pillé le pays à fond avec son clan du crime et la répression musclée que sa police secrète et ses escadrons paramilitaires employaient pour maintenir la « paix ». Peut-être que le doux et gentil Assad n’avait rien à voir avec le pillage, le racket et la terreur, mais il ne pouvait tout simplement rien faire pour empêcher les mafias d’affaires alaouites et basées à Damas de tout accaparer et d’extorquer la population. Le seul problème avec cette version de l’histoire est qu’Assad est au pouvoir depuis près d’un quart de siècle et qu’il avait derrière lui l’héritage politique solide de son père. Et pourtant, cela n’a pas semblé l’aider. Il n’a jamais non plus été idéologiquement opposé à l’Occident de quelque manière que ce soit. Comme Poutine, il a souvent supplié qu’on lui pardonne et qu’on le laisse revenir dans le club.
N’oubliez pas : Assad a débuté au pouvoir en tant qu’actif de l’Occident, un libéral (comme Poutine) qui a délibérément adopté des politiques visant à affaiblir son pays et sa position dans la région. L’une de ses premières trahisons a été le retrait de la Syrie du Liban. Avant cela, il a aidé Bush dans sa guerre contre Saddam Hussein et dans le démantèlement de l’ancien réseau baasiste en Irak. Assad a également laissé la CIA installer des camps d’entraînement terroristes en Syrie, ainsi que les tristement célèbres prisons noires et les sites de torture extrajudiciaire qu’elle a mis en place dans toute la région. En grande partie, la CIA interrogeait de vieux officiers nationalistes arabes et essayait de les convaincre de se reconvertir et de diriger ces nouveaux groupes terroristes qu’elle mettait en place dans tout le Moyen-Orient.
Le plan russe de partition de la Syrie
La triste réalité est que la Syrie était déjà partagée depuis 2016. Une Syrie unie n’était qu’une feuille de vigne posée sur un cadavre. Par Moscou, Téhéran et Ankara. Malgré cela, on nous a dit que Poutine et les mollahs avaient « sauvé » la Syrie, alors qu’ils venaient en fait de conclure un accord avec les terroristes, les rebelles et les Israéliens (mais je me répète) pour occuper différentes parties du pays et simplement ne pas se tirer dessus. Un accord que les Israéliens ont souvent violé, je pourrais ajouter, et auquel Poutine n’a fait que répondre par un haussement d’épaules lorsqu’un nouveau soldat russe était envoyé dans un sac mortuaire pour être enterré dans son pays d’origine. Après le « sauvetage » de Poutine, la seule chose qui restait à faire en Syrie était d’officialiser cette partition.
C’est sinistre.
Mais Poutine a déjà trahi la Syrie en 2016 avec l’accord de « paix » qu’ils ont tenté de faire passer en force. Poutine a même été jusqu’à bombarder l’Armée Arabe Syrienne et Wagner lorsqu’ils commençaient à trop progresser contre ISIS et d’autres groupes terroristes. En tout cas, c’est ce qu’a fait Shoigu.
Peut-être que Prigozhin disait la vérité sur le ministre russe de la Défense ?
Avant même cela, en 2015, Poutine armait déjà des rebelles syriens dans leur lutte contre ISIS. Voici :
« Je noterai en particulier que le travail de notre groupe d’aviation permet d’unir les efforts des forces gouvernementales syriennes et de l’Armée syrienne libre. Actuellement, ses différentes unités comptent plus de 5 000 personnes et, tout comme les forces régulières, elles mènent des opérations offensives contre les terroristes dans les provinces de Homs, Hama, Alep et Raqqa. En outre, nous les soutenons depuis les airs, comme nous le faisons avec l’armée syrienne, en leur fournissant des armes, des munitions et du matériel ».
Ce qui, rétrospectivement, est plutôt étrange si vous prétendez que l’Armée Arabe Syrienne est la seule autorité militaire légitime dans la région et qu’elle se bat pour garantir la souveraineté territoriale et l’unicité de la République arabe syrienne. Poutine a exercé une pression directe sur Assad pour qu’il fasse marche arrière et ne combatte pas les groupes rebelles avec lesquels Moscou, Washington et Ankara (et d’autres) jouaient en sous-main. Pour ce faire, il a supprimé le soutien militaire à l’Armée Arabe Syrienne, forçant ainsi Assad à négocier et à faire des concessions. Bien entendu, cela a été présenté comme un grand geste de « paix » de la part de Poutine 5D.
Poutine a probablement obtenu toute cette stratégie de Macron, qui a également armé presque tous les groupes rebelles à divers moments, ostensiblement pour combattre ISIS également. Voici :
« Lors de ma récente visite à Paris, le président de la France, M. Hollande, a exprimé une idée intéressante qui, selon lui, vaut la peine d’être essayée, à savoir que les troupes du gouvernement du président Assad joignent leurs forces à celles de l’Armée syrienne libre. Certes, nous ne savons pas encore où se trouve cette armée et qui la dirige, mais si nous considérons que ces gens font partie de l’opposition saine, s’il était possible de les faire participer à la lutte contre les organisations terroristes telles que ISIS, Jabhat al-Nusra et d’autres, cela contribuerait à ouvrir la voie à un futur règlement politique en Syrie. »
Pour leur part, Poutine et ses amis ont été plutôt honnêtes lorsqu’ils ont insisté sur le fait qu’ils n’étaient en fait en Syrie que pour lutter contre le « terrorisme », et non pour faire d’autres choses que les propagandistes prétendaient qu’ils avaient secrètement l’intention de faire. ISIS s’est avérée très utile pour toutes les parties impliquées, car elle leur a donné carte blanche en matière de propagande pour faire n’importe quoi et dire qu’il s’agissait d’une mesure d’urgence anti-ISIS qui devait être prise. C’est ainsi que Poutine a justifié le fait que l’Armée syrienne libre (les rebelles qui luttent pour la partition de la Syrie et le renversement d’Assad) ait fait appel aux frappes aériennes russes. Ici :
Et voici le Vladimir Vladimirovitch Poutine qui se vante de la façon dont l’Armée syrienne libre a appelé à des frappes aériennes de la Fédération de Russie :
« Nous avons même collaboré avec l’Armée syrienne libre (ASL). L’aviation russe a mené plusieurs frappes sur les cibles identifiées par l’ASL. Nous avons exclu les zones qui avaient été indiquées par les commandants de l’ASL comme étant sous leur contrôle. Ce fait prouve une fois de plus que nous ne bombardons pas la soi-disant opposition modérée ou la population civile ».
Il ne devrait donc pas être surprenant d’apprendre que Poutine essayait de forcer Assad à signer la partition formelle de la Syrie, une fois que l’on sait que Poutine a armé et soutenu l’ASF et qu’il a coopéré avec l’OTAN (en acceptant même des conseils !) pendant qu’il était en Syrie.
Le traité était une trahison pure et simple, et même Assad n’a pas pu le signer.
Andrew Korybko a réalisé une analyse très détaillée du document il y a près de dix ans. Cette analyse est prémonitoire, mais elle est également très longue, et je ne peux donc pas la reproduire intégralement ici. Le lien complet est ici. Le document rédigé par Poutine contient de nombreux détails intéressants.
Mais, pour l’essentiel, M. Poutine voulait imposer la décentralisation, permettre la cession du plateau du Golan à Israël, l’autonomie kurde, l’octroi de pots-de-vin aux rebelles n’appartenant pas à l’ISIS, une législation sur les discours de haine, le désaveu du projet de nationalisme du Baas, l’introduction de l’autorité de la CPI, l’octroi de l’immunité aux principaux responsables politiques, le départ d’Assad à l’issue de son mandat, ainsi que d’autres idées intéressantes. Tout cela a probablement été proposé pour être ensuite présenté à ses manipulateurs à Washington comme une preuve de l’utilité de Poutine pour eux et leur agenda. Peut-être Poutine voulait-il « échanger » la Syrie contre l’Ukraine, comme l’ont souligné certains analystes. Poutine tient toujours sa part du marché, mais l’Occident ne le fait jamais. Dans le cas de la Syrie cependant, Assad s’est entêté et a refusé de permettre à Poutine de diviser la Syrie et de l’offrir avec une révérence à Washington. Bien sûr, on dit aux prolétaires et aux paysans que Poutine est allé sauver les chrétiens !!! et accomplir les prophéties des BRICS ou quelque chose du genre, alors ils ne prendront pas la peine de lire le lien, naturellement.
J’explique pourquoi la Syrie était déjà partagée de facto et pourquoi Poutine a pu laisser tomber Assad.
Voici les différentes possibilités à ce jour :
- Poutine était contrarié par le fait qu’Assad n’ait pas signé la nouvelle Constitution, ce qui l’a mis dans l’embarras devant ses supérieurs à Langley.
- Poutine s’est vu proposer un meilleur accord par la Turquie
- Poutine a réussi à « échanger » la Syrie contre quelque chose d’autre dont nous entendrons parler dans les semaines à venir.
- Poutine n’avait plus aucune raison d’empêcher la construction d’un oléoduc et d’un gazoduc en Syrie, puisque le NordStream II a été bombardé.
- Israël a offert à Poutine un meilleur marché
- Poutine est dans une telle position de faiblesse qu’il s’est tout simplement enfui.
Ou peut-être tout cela est-il un habile piège patriotique ?
Le prochain domino à tomber
Mettons tout de suite les choses au clair. Gaza n’a eu aucune chance et ne s’est pas vraiment battue de toute façon. Ces mêmes menteurs qui prétendaient toutes ces choses merveilleuses sur l’Axe de la Résistance et le Lion de Damas affirmaient tous que les combattants de Gaza avaient détruit plusieurs fois l’avancée des FDI, les forçant à battre en retraite de façon honteuse. Rien de tout cela n’est vrai, et si vous ne voyez pas pourquoi ce récit est absurde, c’est que vous êtes très très stupide. Comment un camp de prisonniers à ciel ouvert glorifié est-il censé lutter contre l’une des armées les plus avancées et les plus psychotiques du monde ? D’autant plus qu’ils n’ont reçu aucun soutien de la part des nations musulmanes ? Mais peu importe.
Ce que je veux dire, c’est que Gaza est cuit à la perfection. Il suffit d’y planter une fourchette et de la retourner, parce qu’ils sont FINIS.
Pendant ce temps, le Hezbollah a cédé le Sud-Liban à l’armée israélienne. Et la Syrie a été prise par les alliés d’Israël, les forces du HTS qui sont dirigées depuis Ankara, en Turquie. Le chef du Hezbollah a déclaré que « sans la Syrie, la Palestine est perdue ». Je pense que nous pouvons en déduire qu’il prédit que l’armée israélienne s’attaquera ensuite à la Cisjordanie. Une fois le Hezbollah, Assad et le Hamas hors d’état de nuire, elles pourraient se tourner vers une cible plus importante : l’Iran. Nous verrons bien.
Il n’y a pas d’« Axe de la Résistance ».
Un « Axe de l’Impuissance », peut-être.
Poutine a envoyé plus d’armes à la Turquie qu’à l’Armée Arabe Syrienne ou à l’Iran. La Turquie possède des S-400, ce qui n’est pas le cas de l’Iran. Si les Américains et les Israéliens commencent à bombarder l’Iran, il n’y aura pas grand-chose pour les arrêter. Depuis des années, des rumeurs et des fausses informations font état de l’envoi de moyens de défense aérienne de Moscou à Téhéran, certes. Mais ce n’est pas le cas et les gens qui disent cela ne comprennent pas les liens étroits que Poutine et ses oligarques entretiennent avec Tel-Aviv et Ankara, qui ne permettraient jamais à Poutine d’armer Téhéran avant leurs attaques.
Mais bon, à quoi bon spéculer sur ce sujet ?
Peu importe le nombre de fois où l’on donne raison aux doomers, aux blackpills et aux pessimistes, les gens refuseront toujours d’accepter la prédiction suivante comme valide ou au moins possible et donnée de bonne foi. Au lieu de cela, ils traiteront simplement les gens qui disent des vérités difficiles de satanistes de la CIA !!! et passeront les prochains mois à prétendre que Poutine a habilement vaincu les satanistes en Syrie. L’Axe de la Résistance n’est pas doué pour combattre, dédollariser ou décoloniser, mais il est vraiment très doué pour faire semblant de l’être.
Oh, à propos, je pense que certains d’entre vous devraient maintenant soutenir financièrement mon blog. Cela fait un an que je disais que la Syrie, le Liban, l’Iran, le Hamas, se coucheraient comme des malpropres. Il s’avérera que j’ai eu raison à propos de l’Iran également. Et nous pourrons alors discuter de la Chine.
Mais seulement si vous soutenez le blog MAINTENANT.
Combien de personnes ont eu le courage de se mettre en avant et de tirer la sonnette d’alarme à propos de Poutine et de ses amis de la #Résistance ? Pas beaucoup. La vraie victime dans tout ça, c’est moi, franchement.
Et les centaines de milliers de Syriens qui s’apprêtent à vivre une période encore plus difficile que celle qu’ils ont connue sous le gouvernement kleptocrate d’Assad. Mais ne vous inquiétez pas, il y a de fortes chances que vous rencontriez beaucoup de ces réfugiés syriens et beaucoup d’autres réfugiés syriens de toute l’Afrique, de l’Asie centrale et de la Chine qui seront déplacés dans votre quartier dans les mois à venir au nom de la tolérance, des valeurs abrahamiques et antifa de Jésus. Je ne serais pas surpris d’apprendre que Poutine a décidé d’importer quelques centaines de milliers d’Arabes supplémentaires ! C’est tout simplement la chose morale et chrétienne à faire, vous voyez ?
En fait, nos braves leaders de la résistance sont tellement moraux et dignes du Christ qu’ils ne ripostent même pas, littéralement.
J’en ai la larme à l’œil.
Africa24monde avec The Slavland Chronicles. Traduction Olivier Demeulenaere
