Le Franco-ivoirien quitte ses fonctions de directeur général du groupe bancaire zurichois. Pris dans un scandale de filatures visant d'anciens membres de la banque, le Franco-ivoirien, qui dirigeait l'établissement helvète depuis 2015, a présenté sa démission. Il quittera la banque le 14 février.
Dans un communiqué publié aux petites heures du jour, vendredi 7 février, la banque basée à Zurich a annoncé le départ de son directeur général franco-ivoirien. Remercié pour son « énorme contribution », Tidjane Thiam paie aussi le prix de relations conflictuelles avec le conseil d'administration.
« Aucune connaissance »
L'affaire qui vaut son poste à Tidjane Thiam a éclaté en septembre après des révélations sur l'espionnage d'un ancien directeur de la gestion internationale de fortune de Credit Suisse. Iqbal Khan, pressenti un temps pour remplacer Tidjane Thiam, venait de rejoindre la banque concurrente UBS et était soupçonné de vouloir emmener des équipes avec lui.
Le dossier a connu un nouveau rebondissement en décembre lorsque Credit Suisse a reconnu un second cas d'espionnage, concernant cette fois l'ancien directeur des ressources humaines. Les choses se sont encore accélérées il y a quelques jours avec des révélations du « SonntagsZeitungg » affirmant que l'association Greenpeace aurait également été visée.
Selon la presse suisse, Tidjane Thiam a de nouveau indiqué au conseil d'administration, qui s'est tenu jeudi, n'avoir eu « aucune connaissance » de ces agissements qui ont « nuit à Credit Suisse ». « Je regrette ce qui s'est passé, cela n'aurait jamais dû arriver », aurait ajouté le Franco-ivoirien.
Le président Urs Rohner, également cible de vives critiques notamment de la part des actionnaires, a indiqué dans une interview au « Financial Times » que « le second cas d'espionnage avait tout changé dans l'affaire puisque ce n'était plus un cas isolé ».
Le conseil d'administration de Credit Suisse a de son côté exprimé « sa pleine confiance » en Urs Rohner, qui va poursuivre son mandat comme précédemment annoncé jusqu'en avril 2021.
Un autre proche de Tidjane Thiam devrait quitter Credit Suisse
Le dernier «disciple» de Tidjane Thiam a donné sa démission. C’est le Tages-Anzeiger qui l’affirme. Responsable de la communication, du marketing et des relations avec les investisseurs, Adam Gishen devrait faire sa dernière apparition jeudi, lors de la publication des résultats annuels de la banque, aux côtés de son chef qui lui aussi se retirera après la conférence de presse. L’ancienne garde rapprochée du directeur général de la banque n’est plus au pouvoir.
Adam Gishen (à g.) et Tidjane Thiam peu avant une conférence de presse, le 14 février 2019.
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Adam Gishen faisait partie de la «bande des quatre», ainsi que le groupe aurait été surnommé à l’interne selon le Tagi, et qui alimentait les rancœurs au sein de la banque. Cette garde rapprochée comptait aussi Pierre-Olivier Bouée, ancien responsable des opérations, congédié en raison du scandale des filatures, et Peter Goerke, ancien responsable des ressources humaines déchu.
Proches à Prudential
Tidjane Thiam et Adam Gishen se connaissaient depuis que le premier dirigeait Prudentiel. Le second, un ancien de Lehman Brothers, était alors associé de la société d’investissement Ondra, qui conseillait l’assureur britannique. Il avait été engagé en 2015 à Credit Suisse, quelques mois après l’entrée en fonction de Tidjane Thiam, en tant que «conseiller senior du CEO». Le Britannique, qui n’a jamais voulu être basé ailleurs qu’à Londres, a vu ses responsabilités croître avec les années. Il a notamment repris la communication des mains de Peter Goerke en 2019.
Peter Goerke venait aussi de Prudential. Le Suisse y dirigeait les ressources humaines et a rejoint la banque peu après l’arrivée de Tidjane Thiam, d’abord pour reprendre la même fonction, à laquelle se sont ajoutés d’autres dossiers dont la communication et le marketing. Avant que ceux-ci soient transmis à Adam Gishen. A cette date, Peter Goerke a également cédé la responsabilité du personnel et sa place au sein de l’exécutif de la banque pour se focaliser sur le développement de la banque en Asie, sans que l’on sache vraiment pourquoi et sans que sa nouvelle fonction de «conseiller senior», qu’il garde encore aujourd’hui, soit vraiment claire. A la fin de l’année, on apprenait qu’il avait également fait l’objet d’une filature en février, comme l’ancien responsable de la gestion de fortune parti chez UBS, Iqbal Khan.
Pierre-Olivier Bouée, considéré comme le responsable des filatures, a démissionné à l’automne, avant d’être licencié rétroactivement, lorsque la surveillance de Peter Goerke a été découverte. Le Français était proche de Tidjane Thiam depuis plus longtemps. Tous deux se connaissaient depuis leurs années chez le consultant McKinsey, puis chez l’assureur Aviva. Responsable des risques chez Prudential, il a rejoint Credit Suisse en même temps que le Franco-Ivoirien en tant que «chief of staff».
Forcé de démissionner suite aux révélations d'espionnage au sein du Crédit Suisse, le banquier ivoirien Tidjane Thiam, véritable star dans son pays d'origine, voulait partir avec panache. Certains actionnaires, comme le fonds Harris Associates, ne se remettent d'ailleurs pas de son départ. La société, qui détient plus de 8% du capital de la banque, réclame la tête du Suisse Urs Rohner, président du conseil d'administration, qu'elle rend responsable du départ de Tidjane Thiam. Le grand banquier ivoirien qui aura une indemnité d'environ 30 millions de dollars US soit 18 milliards de FCFA (Salaire, bonus, stock options).
Par Tinno Bang Mbang